Les dystonies de fonction chez les musiciens : stratégies de prévention
Par Hélène Bouldoire
Maîtrise en didactique instrumentale
Résumé du projet
Afin de parvenir à une grande maîtrise d’un instrument de musique et se concentrer sur l’interprétation qu’il souhaite transmettre au public, le musicien doit développer de nombreux automatismes (lecture d’une partition, analyse de l’œuvre, réalisation de mouvements complexes, technique instrumentale, etc.). Pour arriver à maîtriser ces divers aspects, la pratique instrumentale doit comporter de nombreuses actions répétitives. Or, cette répétition intensive d’exercices exigeants sur le plan moteur entraîne souvent des affections physiques chez les musiciens. Selon l’association Médecine des Arts, « la majorité des musiciens, environ 75 %, connaîtront au cours de leur carrière un trouble de santé relié à leur pratique » (Arcier, 2007). Les troubles des musiciens se classent en trois catégories principales : les affections musculo-tendineuses et articulaires, les compressions nerveuses et les dystonies de fonction (Tubiana, 2007). Parmi ces troubles physiques, les dystonies de fonction sont les plus délicates à diagnostiquer, car elles sont indolores.
La dystonie du musicien est une affection neurologique caractérisée par la présence de contractions musculaires involontaires entraînant une perte de coordination et de contrôle dans la réalisation d’un mouvement précis (Rosset Llobet, 2013). Cette affection porte le nom de dystonie de fonction, car elle se manifeste uniquement dans une tâche spécifique, dans ce cas-ci, le jeu instrumental. « L’incidence générale des dystonies spécifiques à la tâche [parmi elles, la crampe de l’écrivain] est de 1/3400 (Nutt et coll., 1988) [mais] la dystonie du musicien est beaucoup plus fréquente et on estime qu’elle affecte un musicien professionnel sur cent (Altermüller, 2003, cité par Rosset Llobet, 2013, p. 9) ». Ce trouble affecte des parties du corps soumises durant des années à des mouvements répétitifs. Il survient chez les musiciens professionnels, mais aussi chez les étudiants des établissements supérieurs de musique, jouant de nombreuses heures par jour (Jabusch et Altenmüller, 2006).
Paradoxalement, bien que la dystonie focale ait des répercussions très négatives sur la carrière du musicien (ex. : abandon de la carrière), il n’existe, à notre connaissance, aucun ouvrage permettant au professeur d’instrument de travailler à sa prévention auprès de ses élèves. Il s’agit d’un manque important, surtout lorsqu’on considère que ce trouble peut être facilement évité par de saines habitudes de pratique instrumentale. Mon projet de maîtrise vise donc à faire un pas significatif dans cette direction. Ce projet vise à élaborer un outil didactique ayant pour objectif de sensibiliser les professeurs d’instrument des établissements supérieurs de musique au problème de la dystonie du musicien en leur proposant des approches pédagogiques permettant de prévenir du mieux possible l’apparition du trouble de dystonie focale chez leurs élèves. Autrement dit, cet outil guidera ces professeurs dans la manière d’encadrer la pratique instrumentale de leurs élèves afin que ces derniers prennent davantage en compte les exigences physiques et psychologiques relatives au jeu instrumental pour prévenir la dystonie de fonction.